Dans cet article, je
décris comme l’EMDR (technique de neuropsychologie) m’a aidée à diminuer ma
peur de la sonde naso-gastrique et d’autres problèmes personnels ou liés à la
fin de vie comme la peur et la colère.
Je viens de passer une semaine pleine d’amitié grâce à la
visite d’une chère amie que je connais depuis presque trente ans. Nous nous
sommes connues à l’université, en maîtrise de psychologie clinique dans les
années 1990. Sarah (je change son nom) a choisi la voie de la psychologie
clinique tandis que je choisissais celle de la recherche en psychologie
cognitive développementale. Elle exerce en libéral et en institution comme
psychologue clinicienne. Elle connaît bien les techniques de relaxation,
l’EMDR (dont je vais parler plus bas), et les techniques cognitivo-comportementales, tout en s’intéressant
aussi aux théories psychanalytiques et autres théories centrées sur l’histoire
de l’individu dans son environnement et dans l’histoire de sa famille.
Elle m’a proposé une ou deux séances d’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing) pour m’aider à surmonter
certains des problèmes dont je lui parlais. En particulier ma peur des
vomissements mais aussi mes sentiments de colère qui sont très forts depuis ma
rechute en juin dernier.
Il y a deux semaines les vomissements étaient de retour dans
ma vie accompagnant le blocage intestinal : je ne mangeais plus. Je
pouvais encore boire, lentement et par petites gorgées fractionnées sur la
journée. J’ai commencé à recevoir deux traitements pour diminuer les sensations
de nausée et bloquer ces vomissements. La bonne nouvelle est que ce blocage
intestinal n’a duré qu’une semaine, puis mon activité intestinale a repris et mon
médecin m’a dit que je n’avais pas encore un iléus (blocage intestinal
complet).
Mais les vomissements que j’ai eus durant cet épisode ont
ramené en surface de nombreux mauvais souvenirs liés à mes hospitalisations de
l’été dernier en 2018. L’iléus de l’été dernier a été suivi de longues
hospitalisations et surtout, de semaines entières avec une sonde gastrique qui
passait de ma gorge à mon estomac pour le vider en permanence et éviter les
vomissements intensifs qui m’affectaient alors.
Je ne pouvais plus supporter ce tube !!! La première
chose que j’ai demandé en arrivant à l’hospice l’année dernière a été de ne
PLUS JAMAIS avoir ce tube gastrique dans la gorge. Le tube avait eu un effet
traumatique. Parfois, lorsque je me réveille au milieu de la nuit et que
j’essaie de me rendormir, je n’arrive pas à m’endormir : j’ai une
sensation d’un pieux planté en milieu de mon ventre et me fixant au sol,
m’empêchant de bouger.
J’ai déjà discuté maintes fois avec mon médecin et avec le
personnel ici de ma peur du tube gastrique. On m’a rassurée mille et une fois
patiemment, mais je continue à avoir peur qu’on m’incite à le prendre lorsque
un blocage intestinal arrivera à nouveau. À l’hôpital, j’avais cédé. On a beau
dire que le patient décide, lorsqu'on est affaibli et qu’on a six blouses
blanches debout autour du lit… quelle liberté reste-t-il de dire non ?
J’ai une peur terrible que le scénario se répète : on me dit maintenant
qu’on fera tout pour ne pas avoir à recourir à la sonde gastrique pour limiter
les vomissements, mais, si jamais on cherchait quand même à me faire changer
d’avis et que je n’ai plus la force de refuser … ?!
Sarah m’a proposé une session EMDR pour m’aider à me
débarrasser ou atténuer cette peur et ce souvenir traumatique. L’EMDR est une
technique efficace pour soigner les traumas. J’en connaissais le principe, mais
je ne savais pas comment se passait une séance sur un plan pratique.
J’ai été étonnée de la simplicité du procédé. Sarah a
installé deux chaises face à face avec un léger décalage de telle sorte que
j’allais m’asseoir face à son bras droit. Nous avons discuté de l’image, ou
sensation, ou phrase, ou autre chose qui serait le point de départ et qui était
fortement associé à mes souvenirs de la sonde gastrique.
Je me suis alors remémoré mes sensations lorsque j’étais
allongée la nuit à l’hôpital et que le tube passait dans ma gorge, m’empêchant
de déglutir normalement et m’empêchant de dormir.
Sarah a commencé la session : elle me demande de suivre
des yeux ses doigts qui font des allers et retours devant mes yeux. Pendant ce
temps, je dois laisser aller mes pensées là où elles me mènent, prendre
conscience de mes sensations corporelles, de mes pensées, de mes ressentis
divers.
Sarah s’arrête au bout de quelques secondes et me demande ce qui est
arrivé : quelles pensées ou sensations sont apparues ? Puis sans
commenter, elle m’encourage à continuer. Je reprends la procédure : je
suis des yeux ses doigts qui font des allers et retour devant moi avec pour
point de départ, soit les dernières images précédentes, soit l’image de départ.
Quelques secondes, et on reprend la procédure et ainsi de suite plusieurs fois.
Le procédé n’est pas désagréable, et me mène sur des images
du passé et du présent ainsi que sur des sensations corporelles nouvelles. Lorsque
je réévoque l’image de départ, de nouvelles images et nouvelles associations
apparaissent.
Lorsque Sarah me dit que c’est terminé, je suis étonnée.
C’est tout ?! Je ne me sens pas radicalement différente. J’attendais un
effet « tah-dah ! » mais rien de cela. Je me sens apaisée et
fatiguée.
Mais ça marche ! Les souvenirs de l’hôpital me
reviennent comme des souvenirs, mais sans peur. Je me sens tout à fait en
confiance. Je découvre que j’ai confiance en mon médecin de famille et dans
l’équipe infirmière qui m’entoure à l’hospice. Je me remémore la voix de mon
oncologue quand il m’expliquait que la sonde gastrique était vraiment
préférable : c’est un lointain souvenir, qui semble détaché du présent.
Mon médecin de famille n’est pas mon oncologue, c’est évident maintenant, et
mon équipe de palliatif n’ira jamais me forcer à une sonde gastrique… et même
si c’était le cas, je me sens tout à fait assez forte et entourée par mes
proches pour la refuser.
Sarah m’a proposé ensuite d’autres sessions sur d’autres
thèmes, pour m’aider à surmonter des émotions et problèmes liés à ma situation,
peurs et colère. Mon sentiment de colère en particulier était très fort depuis
mon arrivée à l’hospice il y a six mois. Je le sentais mais je ne savais pas
quoi faire pour stopper ces sentiments… Une session de EMDR sur une scène où je
me suis sentie très en colère m’a aidée à diminuer ce sentiment. Je me sens
beaucoup plus calme, je peux sentir une différence immédiate dans mes réactions
envers mon entourage. Je me sens beaucoup plus sereine.
J’ai l’air de faire une pub pour la technique… 😊
Je voulais décrire ici comment ça a marché pour moi, car j’ai été vraiment
surprise de la simplicité de la technique et de ses résultats immédiats. Je me
sens vraiment mieux depuis plusieurs jours. J’espère que j’arriverai à maintenir
ce sentiment de sérénité. J’ai envie de pratiquer à nouveau la méditation de
pleine conscience, et ai ressorti le disque de méditation Kabat-Zinn pour m’y
remettre… bon je ne sais pas si j'arriverai à m'y remettre car je suis si fatiguée... mais j'en ai l'envie 😊
Je vous embrasse et vous souhaite beaucoup de courage mes
amies et sœurs de combat, et toutes les familles et proches de nous. Merci pour
vos messages, ils m’encouragent. Je suis de plus en plus fatiguée, et à chaque
article écrit ici, je me dis que ce sera peut-être le dernier, mais mon corps
semble encore vouloir lutter et se défendre contre la bébête. J’ai réussi à
reprendre mes pinceaux et je regarde, surprise, les premiers signes du printemps
arriver dans les jardins… La vie est
belle, je vous aime et j'espère que vous allez pour le mieux. Je pense à vous, toutes celles qui me laissent des messages, les filles du forum, nous sommes si proches sans nous être rencontrées ! Bon courage, je vous aime, je vous embrasse amicalement,
Catherine
***
- Association EMDR pour la France et l'Europe : http://www.emdr-france.org/web/quest-therapie-emdr/ (site en français). Il s'agit de l'association fondée par Francine Shapiro qui est l'experte qui a découvert et développé la technique sous forme de thérapie (http://www.emdr.com/francine-shapiro-ph-d/).
La technique est également recommandée par David Servan-Schreiber. Voir ses publications en français comme les livres "Guérir le stress, l'anxiété, la dépression sans médicaments ni psychanlyse"et "Anticancer".
- Thérapies : Si vous cherchez un thérapeute qualifié, il est important de vérifier que le thérapeute est certifié ou diplômé par cette association EMDR qui a des branches plusieurs pays. Liste des pays ici :
https://emdr-europe.org/associations/european-national-associations/
- Explications sur la technique de l'EMDR :
Site de l'association EMDR : https://emdr-europe.org/about/what-is-emdr/ (en anglais)
3 commentaires:
Ma reine, ce matin une belle rose est venue réjouir mon coeur, je vais de ce pas lui trouver un écrin... tu es là avec elle, toujours et pour toujours. Je t'embrasse très fort.
J'ai pensé qu'elle s'était noyée en chemin ou perdue, coincée, au fond d'une cale d'avion postal...? Bref, je ne pensais plus qu'elle arriverait ! :-) Je t'embrasse !
Merci jolie Catherine, pour tout ce que tu m'apportes en courage et en fermeté. Ces écrits sont précieux et m'aident à surmonter mes peurs et mes angoisses. Tu es une héroîne! Plein de pensées de soutien
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