Je crois que je viens d'entrer dans le cercle de ces pauvres fous! Dans les semaines qui ont suivi l’arrêt de la chimiotherapie, mes moments de joie étaient toujours très obscurcis par l’angoisse et même la dépression. Petit à petit, les peurs et les pensées noires ont perdu toute leur intensité. La pensée que le cancer pourrait revenir est toujours très présente, mais elle ne me fait plus autant souffrir. Je chasse le cancer de ma vie mentale comme on me l’a appris dans les cours de méditation et de gestion du stress: j’y pense parfois mais je laisse passer ces pensées sans m’y attacher.
Au quotidien, je
suis incroyablement heureuse. Bonheur = (heureux)². "Meta-bonheur: Fait d'avoir du bonheur à avoir du bonheur" (Le Petit Dictionnaire de Catherine)
Aux
Pays-Bas, après une longue maladie, on reprends le travail très
progressivement, en accord avec le médecin du travail et l’entreprise. Je ne
suis pas officiellement de retour mais je suis en “réintégration”. J’augmente
mes heures de travail toutes les deux semaines. Je m’en sors bien et je fais en
ce moment 3 journées de 5 heures par semaine. Les collègues se sont réhabitués
à ma présence! Régulièrement, quelqu'un m'embrasse en me disant combien il ou elle est soulagée de me revoir.
Je travaille sur
un projet qui m’intéresse énormément, dans lequel j’apprends beaucoup et que je
trouve utile. Ca aide, et ce n’est pas un hasard. Mon employeur y est tenu par la loi et le médecin du travail
m’aiderait à trouver un autre emploi si je ne pouvais plus faire celui qu’on me
propose.
Mais à vrai dire,
je suis très hereusee là où je suis. Mes collègues me demandent comment je vais
et mon sourire jusqu’aux oreilles leur répond. Je n’ai jamais été aussi
heureuse de ma vie! Les choses toutes simples me font très plaisir.
Les gens stressés
au bureau me font rigoler en douce. Je pense alors aux personnes qui sont à l’hopital
dans la salle de chimio et je me dis “Vous n’avez aucune idée de la chance que
vous avez de 'stresser' au travail au lieu d’etre entrain de vomir vos tripes”. Je
ne leur dit pas, ca ne servirait pas à grand chose. Mais je pense souvent avec
compassion aux patients de l’hopital. J’ai
l’impression d’avoir gagné 50 ans de sagesse en quelques mois de maladie.
C’est donc vrai
qu’on peut etre incroyablement heureux apres le cancer, et que ce n’est pas
parce qu’on l’oublie. On le met de coté. Et on continue de vivre. Beaucoup plus
intensément qu’avant.
Cette photo est de Esther Sternberg, une lectrice newyorkaise qui a découvert mon blog par hasard et me laisse des messages de temps en temps. Merci Esther, j'adore vos photos et vos peintures. Esthersternbergart.com