jeudi 6 septembre 2012

Pas de perruque (No Wig for Me)

(English version below)
 
 
A 16 jours de la chimio carbo- et taxol, la tête me gratte et je me retiens d'agraver les démangeaisons en évitant de me toucher le crâne. C'est le signe que mes cheveux vont bientôt tomber à nouveau. Arrgh! Quelle horreur! C'est un des pires moments à passer! 
 
Le première fois je n'ai pas pu me regarder dans un miroir pendant plusieurs jours. Puis je m'y suis habituée mais je n'ai jamais aimé ce que j'y voyais. Petit à petit je me suis habituée. On m'a dit cent fois que les cheveux courts me vont vraiment bien. J'ai fini par finalement le croire aussi! Alors va pour les cheveux courts. Et un petit foulard sur la tête pendant les trois prochains mois.
 
J'ai choisi de ne pas porter de perruque. Je n'ai pas envie de faire l'effort d'avoir la tête qui gratte et de me demander toutes les cinq minutes si "ça" se voit. La perruque c'est pour plaire aux autres, mais ce n'est pas confortable. Est-ce que je veux penser à moi ou aux autres? Est-ce que je suis plus laide avec ma casquette qu'avec une perruque? Ce n'est pas une décision rationnelle, ce sont les émotions qui nous guident dans ce choix. Pour moi c'est une décision dictée par des souvenirs.
 
J'ai travaillé comme volontaire autrefois à l'association Aides à Dijon. C'était le début de l'épidémie de Sida. Les séropositifs, souvent des hommes homosexuels, cachaient le plus souvent leur statut. J'en ai connu un qui prétendait avoir le cancer de l'estomac pour ne pas avoir à réléver la honteuse vérité. Je souffrais pour eux de connaître leur secret et de savoir qu'en cachant la vérité ils ne permettaient pas à leurs bons amis de les soutenir. Quel immense isolement ont dû ressentir ceux qui n'ont jamais rien dit!
 
Alors je n'ai pas envie de cacher ma maladie. Je ne veux pas l'étaler non plus. Mais je ne veux pas avoir à la cacher pour éviter le regard des autres. Lorsque j'ai travaillé avec les enfants en fauteuil, tout le monde les regardait partout où ils passaient et ils n'avaient pas le choix. Il fallait quand même bien que leur vie continue et qu'ils s'amusent au parc Nigloland, commes les autres, et malgré les regards! A la société d'évoluer et d'apprendre à mieux accepter ses malades et ses handicapés. Sortons tous et montrons nous!
 
L'an dernier, je portais une casquette en laine en octobre alors qu'il ne faisait pas encore très froid. Mon occuliste chez qui je passait pour acheter mes lentilles jetables m'a lancé "ben vous avez peur d'attraper un rhum!". Plusieurs mois plus tard, je repassais et il se souvenait encore de sa remarque et s'est excusé: "Je suis désolé mais je ne me suis aperçu que lorsque vous être sortie que vous n'aviez plus de cheveux dans la nuque et j'ai compris." Il était absolument désolé de toute évidence, n'avait pas oublié l'incident, et m'a demandé gentiment des nouvelles de ma santé. J'ai répondu que le bon coté de cette histoire est que je ne devais pas avoir l'air malade du tout à part mes cheveux!
 
Alors, je m'expose au risque de recevoir des regards un peu pesants ("elle a plus de cheveux celle-là, pourquoi, ça doit être un cancer, merde elle a l'air jeune pourtant..."), peut-être des regards de pitié. Mais aussi du soutien et de la chaleur humaine! Ce serait dommage de s'en priver. Le cancer m'a habituée à accepter l'aide des autres sans me sentir humiliée, diminuée, et tout en gardant mon respect - et bien sûr aussi sans en abuser. Ne pas recevoir cette chaleur humaine, toute cette humanité, ce serait s'isoler dans la tristesse de la solitude. Alors, je n'ai pas besoin d'une perruque.
 
Florence est entrain de me coudre les "tubes" en tissus qui sont bien pratiques à enfiler et à nouer dans le cou. Prenez un carré de 50 cm sur 50 cm d'un tissu doux et un peu élastique, cousez-le sur un coté - ça fait un "tube". Vous l'enfilez sur votre tête et vous roulez le bout du haut sous la nuque. J'ai acheté plusieurs tissus au marché et j'ai ai de plusieurs couleurs. Un petit coup de rouge à lèvre, le tour est joué. Quand je sors, je peux porter par-dessus une casquette habillée; l'hiver un bonnet ou une casquette en laine.
 
Au Nouvel An, j'aurai à nouveau une coupe courte et on boira alors à notre bonne santé en sachant de quoi on parle.
 
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English version

Sixteen days after the carbo-and taxol chemo, my head feels itchy and I try to control my hands to avoid scratching my head and aggravating the itching. This is a signal that my hair will soon fall again. Arrgh! Horrible! This is one of the worst times to go through!

The first time I could not look at myself in a mirror for several days. Then I got used to it but I never liked what I saw. Gradually I got used to seen myself bold. Then the hair grew back so slowly. A hundred people told me that short hair fit me really well. I ended up to finally believe it as well. Then I'll go for short hair. But for the next three months, it will be a simple head scarf.

I chose not to wear a wig. I did not want to make the effort to have the head scratching and wondering every five minutes if "it" shows. The wig is to please others, but it is not comfortable. Do I want to think about others comfort or mine first? Am I that ugly when I wear a cap compared with a wig?

It is not a rational decision actually. Strong emotions guide our choice. For me it is a decision dictated by memories. I once volunteered to the Aids association in Dijon. It was the beginning of the AIDS epidemic. HIV-positive people, often gay men, most often felt like hiding their status especially at work. I knew one who claimed to have stomach cancer not to have to disclose the shameful truth. I suffered with them, knowing their secret and knowing that by hiding the truth they were also not allowing some good friends to support them. What an immense isolation must have felt those who have never said anything!

So I do not want to hide my illness. I do not want to show off either, there is nothing to be proud of really. But I do not want to hide it by fear of others opinion. When I worked with children in wheelchairs, everyone looked at them with pity or fear, everywhere they went, and they had no choice. Their life had to go on and they had fun in entertainment parks despite the looks! Ultimately, it's up to the society to grow and learn how to accept the sick and disabled. So let's get out without fear.

Last year, I wore a wool cap in October when it was not yet cold. The tenant of an store where I stopped by to get a box of lenses gave me: "well you're afraid of getting a cold!?" Several months later, I was passing by again and he still remembered his remark and apologized: "I'm sorry but I have noticed only when to turned to get out of the store that you had no more hair in the neck only then I understood. I am so sorry for what I said!" He was indeed really embarrassed, had not forgotten the incident, and then asked me gently about my health. I replied that at least, the good side of this story is that I did not look sick at all!

So I expose myself to the risk of receiving some heavy looks ("oh dear she seems to have no hair, probably cancer, shit, she looks so young though..."), and may be the looks full of pity. But also support and warmth! It would be a shame to miss it. Cancer has accustomed me to accept help from others without feeling humiliated or diminished, and while keeping my respect - and of course without abusing from the situation. Why not accepting this warmth, this whole humanity, the best of what human beings have to offer to each other? Why would I rather choose to hide my condition and remain isolated and lonely? So I do not need a wig.

Florence is in the process of sewing me "tubes" in tissues that are handy to put on and tie. Take a square of 50 cm x 50 cm with a soft and slightly elastic fabric. Sew it on one side: it makes a "tube" shape. Put it on your head and tie the end of it on your neck. I bought several fabrics at the market so I can have them is various colors. Lipstick. You're done. When I go out, I can wear it also under a nice cap.

Next New Year, I'll have a short cut again and then we will all drink to our good health,  knowing what we are talking about.




4 commentaires:

Unknown a dit…

Catherine,

In my eyes you are beautiful with or without hair.

My son sent me a picture of himself and his family. In the picture he is bold. I said to myself "Oh my G-d, is he going through change in life -now that he will soon be 40?" He looks so happy in that picture. Not at all phased with what people will think of him. When I called him and asked him if this is a permanent decision, he told me that "While cutting his hair (that is very, very short to begin with and he used electrict razor) the razor fell out of his hand and made a clean bold spot on one side so he decided to just go bold". That was all, nothing to discuss. Like it or leave it, that is his motto. I understand that women feel differently about their hair, but we also feel bad about our teeth and about wearing hearing aids, or wearing dentures. I am in the process of having my teeth fixed and I wear dentures for the last five months. It is hell, let me tell you, but I know that eventually all will be well. I wear hearing aid too because I am almost deaf, but that is life. SO I have to put up with it or just sink into depression. So, Catherine, you are beautiful with or without hair. There, I said it all. Go and have a good life beautiful person that you are.

Julie a dit…

Je suis aujourd'hui à 16 jours post chimio et le cuir chevelu me gratte... et les cheveux me restent dans les mains...j'aurais pu écrire le même message... je me prépare doucement... pour moi ce sera la première fois que je perds mes cheveux mais je me suis déjà rasée le crâne pour soutenir la cause (je ne croyais jamais à ce moment qu'un jour ce serait mon tour!!!)
C'est le regard des autres qui m'inquiète le plus... et surtout les explications que les enfants devront donner quand les copains verront leur maman pas de cheveux... je me suis acheté de jolis foulards, reste à me pratiquer... demain je retourne chez le coiffeur pour me faire couper les cheveux très court ce sera plus facile... j'avai déjà racourcit le tout il y a 3 semaines... c moins un choc... merci de partager votre opinion sur le sujet... ça me réconforte de savoir que quelqu'un d'autre (même à l'autre bout du monde) pense comme moi! merci d'écrire ce que je pense...
Julie

Elo a dit…

Chere Catherine,
Quel joli message! Oui, tu es superbe avec ou sans cheveux! Et effectivement, c'est la vision des autres que l'on essait de proteger plutot que la sienne alors qu'il n'y a aucune honte a avoir. Je compte bien boire un coup a ta sante ce dimance avec toi et tes amis et en reboire un au nouvel an, avec ta nouvelle coupe!

Catherine T. a dit…

Merci a toutes pour vos commentaires. J'ai rase mes cheveux le matin de mon anniversaire car ils tombaient trop - a la tondeuse eletrique. Ensuite jái fait quelques minutes de meditation et je me suis sentie plus sereine. J'ai passe la journee a preparer la maison et preparer un buffet pour mes invites et ai passe une tres bonne apres midi et soiree entouree d'amis. Avant je pensais a lápres cancer comme a une periode ou la vie normale reprendrait mais j'ai arrete de penser de cette facon. La vie continue, la plus normale possible, meme pendant la chimio - juste un peu plus lentement. Merci pour vos mots de soutien :-)