jeudi 10 décembre 2015

Quelques nouvelles: Avastin va reprendre; le médecin du travail est cool ; et je m'amuse comme je peux


Je vais de mieux en mieux, et le moral remonte, un moral qui était assez bas depuis l’annonce de la récurrence puis les chimios qui ont suivi. Je sens que je vais mieux à nouveau, et que l’anxiété, les moments de gros blues, et l’immense colère intérieure, sont partis en arrière plan. Pas disparus. Mais je leur ai un peu botté le cul pour qu’ils aillent s’asseoir au fond de la classe.
Les moments où je profite simplement du présent sont de nouveau revenus, tout doucement, au fil des jours et des semaines, et désormais ils sont bien plus nombreux que les moments tristes. Je ris et je chante à nouveau dans la maison, le sapin est monté, les bougies brillent le soir… Quel bonheur !
On n’a qu’un mot pour le bonheur, mais on devrait en avoir au moins deux, un pour le bonheur-tranquillité et un pour le bonheur-excitation. En ce moment, je savoure des semaines très tranquilles, simples, lentes, apaisantes. La vie est plein de paradoxes - je suis très (tranquillement) heureuse. Apaisée. 

Bref, me revoici au clavier, et voici quelques nouvelles : mes prochains traitements ; la question de la reprise du travail ; et comment je passe mes journées (utilement et agréablement de préférence). 

Sur le plan des traitements. Enfin, la cicatrice de l’ancien PAC s’est refermée. Je reprendrai dans trois semaines le traitement Avastin (Bévacizumab), un anti-angiogénique (inhibiteur du VEGF). Ce médicament sera administré par infusions, toutes les trois semaines. C’est désormais un traitement à vie pour moi, m’a dit l’oncologue. L’Avastin ne devrait pas entraîner trop d’effets secondaires – peut-être de la fatigue supplémentaire, peut-être des maux de tête (plusieurs copines du forum en ont parlé). Le principal risque sont les accidents et blessures, car l’Avastin retarde la formation des vaisseaux sanguins. Il faut donc éviter les chutes de vélo (pour le moment, j’évite d’en faire !) et éviter d’avoir à se faire opérer (mais c’est un peu plus difficile à éviter).  
Pour le moment, rien d’autre. Je dois juste aller une fois par semaine à l’hôpital pour faire nettoyer le cathéter, le PICC (peripherally inserted central catheter) installé sur mon bras. Le PICC ne me pose pas de problèmes, c’est juste ennuyeux de prendre sa douche avec un bandage plastique sur le bras ; je ne peux plus prendre un bain entier ou aller à la piscine, mais il y a eu pire, n’est-ce pas.

Avant-hier, le médecin du travail m’a autorisée à continuer de rester chez moi pour me reposer et récupérer à mon rythme. J'étais incroyablement stressée avant notre entretien. Mais il s'est montré très empathique, m’a dit que lorsque je me sentirai prête, je pourrai y retourner quelques heures, et on arrangera un mi-temps en fonction de ce que je peux faire.En attendant, je dois continuer à me reposer et à me remettre en forme, physiquement et mentalement. 
Il m'a dit qu'étant donné la récurrence, mon statut avait changé et personne ne pouvait me forcer à reprendre le travail. Je peux, soit tenter de reprendre à mi-temps, soit terminer mon congé maladie et demander une pension invalidité. 
C’est un énorme poids qui est tombé de mes épaules, car j’avais très peur de me sentir poussée à reprendre le travail alors que je ne m'y sentais pas prête du tout. Je n'aurais pas la force en ce moment d'y retourner, me mettre à jour, reprendre le rythme, me forcer à sourire et à dire que tout va très bien, me concentrer sur des chiffres... tout en pensant à ce fichu cancer qui continue sa progression en silence. Le médecin m'a vraiment bien conseillée. Je ne sais pas encore si je reprendrai le travail ou non, cela dépendra de ma fatigue et de la progression de la maladie bien sûr. Ma maladie est devenue chronique, certes, mais n'est pas au stade terminal. Mais bon, un jour à la fois: pour le moment, rien n'est certain, mais le soulagement est immense de savoir qu'un bon système social est déjà en place pour me soutenir financièrement dans cette transition si difficile.  

Je suis donc à la maison, et je me remets en forme doucement. J’en profite pour souffler, me relaxer, lire, prendre le temps. Du temps, il en faut, pour absorber le choc encore difficile à digérer de l'annonce de la récurrence, et pour récupérer physiquement de l'épreuve des dernières chimios.
Je profite un maximum de cette nouvelle vie. J’ai terminé d’écrire mon autobiographie illustrée (le concept de life book en anglais). J’y ai copié et commenté de nombreuses photos de famille.
Et je me suis investie dans un nouveau projet qui me fait passer de belles heures très intéressantes et pleines de créativité : j’ai commencé à écrire un « roman scientifique » (si, si, ça existe). Je ne sais pas ce que cela donnera mais cela m’amuse beaucoup. Mes personnages vont parler de neurosciences et de psychologie ; donc un livre de vulgarisation scientifique (en l'occurrence, la psychologie) à travers une fiction.
Je dois faire beaucoup de recherches, à commencer par la relecture minutieuse d’ouvrages qui prenaient justement la poussière sur mes étagères. Et pendant quelques minutes ou quelques heures parfois, j’oublie où je suis, qui je suis, je me perds dans mes créations, je réfléchis aux personnages, aux endroits où les scènes se déroulent (au soleil de préférence !). Je m’amuse !

Il n’y a pas beaucoup d’avantages à avoir le cancer, alors lorsqu'il y en a, profitons-en.