lundi 26 décembre 2011

Nouvel An, Nouvel Espoir (New Year, New Hope)

(English translation below)

Nous avons passé de très bonnes fêtes de Noël, mon fils et moi. Nous avons choisi  l’option paresseuse cette année: nous nous sommes laissé inviter par des amis. Comme nous n’avons aucune famille sur place aux Pays-Bas, et que je ne me sentais pas assez en forme pour voyager en train et rentrer en France, cette année les amis expatriés ont remplacé la famille. Nous avons eu des dîners superbes. Le 24 au soir, une soirée franco-néérlando-portugaise avec une morue au gratin, un plat portugais traditionnel, un délice. Et hier soir, le 25 Décembre, une soirée néérlando-canadienne, avec une vraie grosse dinde de Noël qui ne voulait pas cuire, comme dans les films comiques. Un dîner également délicieux qui s’est terminé en musique.

Nous avons aussi vu de nouvelles têtes. J’adore rencontrer de nouvelles personnes dans les soirées en petit nombre où on a le temps de parler. William pouvait quitter la table pour jouer lorsqu’il le voulait tandis que les adultes buvaient, riaient ou argumentaient. Je l’avais gâté le matin en plaçant sous le sapin plus de cadeaux que d’habitude, il était très heureux !  

Je dois avouer tout n’était pas rose. Une semaine seulement après ma chimio, mes intestins étaient encore très dérangés et je souffrais de douleurs dans le ventre qui m’ont obligé de temps en temps à quitter la table pour aller m’allonger. Et surtout, j’ai parfois pensé que c’était peut-être mon dernier Noël ou en tout cas, un des mes derniers… et ça, c’était la partie la plus difficile.

Mais mon Mot de 2012 est l’Espoir. Ça ne viendra pas tout seul dans une situation où les statistiques ne sont pas en notre faveur. Il faut y travailler.

Cultiver l’espoir, c’est laisser passer les idées noires, et profiter du présent. C’est un processus actif. Au moment où les pensées pessimistes nous viennent en tête, il faut en prendre conscience au lieu de les laisser dominer nos émotions. Ça parait idiot mais il faut engager un dialogue avec soi-même : « Ce n’est pas le bon moment, je réfléchirai à ça plus tard ». Se laisser aller à la pitié et à la tristesse serait facile. On pourrait même trouver une bonne âme à qui raconter nos misères, le soir de Noël, pendant que les autres convives s’amusent. On trouverait pour quelques moments un peu de soutien et on pourrait ruminer et baigner encore un peu plus dans notre tristesse.

Il faut avoir la discipline de prendre conscience de certaines pensées pessimistes et destructrices, et simplement leur dire : « Pas maintenant ». Ceux qui font de la méditation apprennent à regarder ces idées et à les laisser passer pour se concentrer sur autre chose (leur respiration, ou certains thèmes choisis à l’avance). En psychologie cognitive, on demande aux patients déprimés ou obsédés par certaines idées de prendre conscience des idées noires et envahissantes (en les écrivant par exemple dans un journal pendant plusieurs jours au départ), puis on apprends à remplacer ces idées par d’autres, plus optimistes, joyeuses et énergisantes.

Je choisis plutôt la première option. Lorsque la pensée pessimiste arrive avec tout son attirail de tristesse (« combien de Noël encore vais-je pouvoir fêter ? »), je me concentre sur le présent et sur ce qui se passe autour de moi. Je regarde plus intensément. Je fais attention aux détails. J’écoute plus attentivement. Les pensées noires restent en coulisse, et je profite beaucoup mieux de la beauté du présent. Je deviens très consciente et  reconnaissante de ce que j’ai au lieu de souffrir en pensant à ce que je n’ai pas. Le banal devient plus beau et je suis beaucoup plus heureuse. La stratégie a marché car j’ai été heureuse et suis remplie de bonheur ce matin. Je me remémore tous ces moments avec délice ! A ajouter à mon jardin secret que je rempli des souvenirs des bons moments du passé.

Compter les jours qui nous restent est impossible, c’est triste et c’est terriblement angoissant. Bref c’est un cul-de-sac. A éviter. Il vaut bien mieux se concentrer sur le présent et profiter de chaque moment et de chaque cadeau que la journée nous offre. Avec le bonheur revient aussi le dynamisme et l’envie de faire de nouvelles choses. Donc c'est aussi un processus qui permet d'emmagasiner des forces pour le futur.

Mais assez écrit pour ce matin. Je dois vite me préparer car j’ai de la famille qui arrive aujourd’hui. Au programme, visite du zoo avec une nièce, son mari et leurs enfants. Après-demain, c’est le tour de mon frère qui arrive avec sa femme et mes deux nièces et je leur ai préparé une grande surprise : J’ai réservé des tickets pour un spectacle de patinage sur glace !

Amusez-vous bien ! ;-)

... and two days after writing this post, we saw this...
and we sang "Copacabana" all day long for the next 3 days!




***

English Translation: Merry Christmas and enjoy!

We had a great Christmas, my son and I. We chose the lazy option this year and let ourselves be invited by friends. Since we have no family locally in the Netherlands, and I did not feel fit enough to travel by train to return to France, expatriate friends have replaced the family. We had wonderful dinners. On the evening of the 24th December, we had a French-Dutch-Portuguese diner with among other dishes a cod “en gratin”, a traditional Portuguese dish, a delight. And last night, on December 25th, we had a Dutch-Canadian party, with a real big Christmas turkey, that was reluctant to be cooked, as in the best comedy films. Another delicious dinner that ended up with music.

We also saw new faces. I love meeting new people at parties in small numbers when we have time to talk. William could leave the table when he wanted, to go play, while the adults drank, laughed or argued. I had spoiled him in the morning, by placing more gifts than usual under the tree, and he was really very happy!

I must admit it was not all rosy. A week after my chemo, my intestines were still very upset and I suffered from time to time from severe pain in the belly that made me at times leave the table to go lie down. The worst part was that I was sometimes thinking that it might be my last Christmas, or perhaps one of my last ... and that was the hardest.

But my Word for 2012 is Hope. It will not come automatically in a situation where the statistics are not in our favor. It is something that we should work upon actively.

Cultivating Hope is to let dark thoughts aside, and enjoy the present. It is an active process. When the pessimistic thoughts come to mind, one must be aware of them rather than let them control our emotions. It seems silly but we must engage in dialogue with ourself: "This is not the right time, I will think about it later." Indulging in pity and sadness would be easy. We could even find a good soul to talk about our miseries, on the Christmas Eve, while the other guests keep on chatting and drinking, unaware of our distress. We could then find, just for a few moments, some support and we could then continue to dip a little more in our sadness.

But don’t go there. You must have the discipline to become aware of some pessimistic and destructive thoughts, and simply say, "Not now." Those who do meditation learn to look at their thoughts and let them pass to focus on something else (their breathing, or themes selected in advance). In cognitive psychology, depressed or obsessed patients are asked to be aware of their dark and invasive thoughts (eg by writing in a newspaper for several days at the start), then learn to replace these ideas by others, most optimistic, joyful and energizing.

I choose the first option. When the pessimistic thinking comes with its kit of sadness ("How many Christmas do I have left?"), I focus on the present and what is happening around me. I look more intensely. I pay attention to detail. I listen more carefully. The black thoughts remain behind the scenes, and I enjoy more the beauty of things around me. I become very aware and appreciative of what I have instead of suffering of what I don’t and won’t have. Even the ordinary becomes beautiful and I am much happier. The strategy worked yesterday. This morning, I am happy and filled with joy. I remember all these times already with delight! To be added to my secret box of good memories.

Counting the days that remain is impossible, it's terribly sad and totally scary. In short, it is a cul-de-sac. Avoid it. It is far better to focus on the present and enjoy every moment and gifts that every day offers. Happiness also comes with the drive and desire to do new things, so there is much more behind it than just enjoying the present like an idiot. It's about building strenght for the future as well.

But enough with writing this morning. I must quickly get ready because I have family coming today. The program: zoo visit with my niece Sarah, her husband and their children. The day after tomorrow is my brother Christophe’s turn. He comes with his wife and my two nieces and I have prepared a surprise: I booked tickets for an ice skating show! Don’t tell them!

Have fun! ;-)

mardi 20 décembre 2011

Une séance de chimio typique (A typical session of chemo)

(English Translation below)

Hier, je suis allée à mon avant-dernière séance de chimio.

La veille, j’ai passé une très mauvaise nuit avec toutes sortes de cauchemars morbides. Mais le matin, je suis prête et je sais que je n’ai aucune raison d’avoir peur : la journée va sa passer doucement et sans effets secondaires notables. Le plus dur, c’est surtout l’ennui à vrai dire.

Mais pour cela, pas de problème, j’ai pensé à tout. J’ai emmené mon Kindle, le lecteur électronique sur lequel je peux lire les livres du site Amazon. Donc je rentre à l’hôpital confiante de transporter sur moi des centaines de milliers de livres en poche.

Je n’oublie pas, beaucoup plus essentiel, les médicaments anti-nauséeux qu’on m’a prescrits et qu’il va falloir prendre régulièrement pendant 4 jours.

Ma copine Florence, mon ange gardien, m’a conduite à l’hôpital en voiture pour 9h du matin. Les lieux sont très familiers, et lorsque je passe au bureau pour m’enregistrer on ne me demande aucune carte. Je leur lance mon nom et je me dirige vers le service oncologie, comme une abonnée.

Les perfusions ont lieu dans une grande salle commune de six places. C’est une salle lumineuse avec de grandes fenêtres, beaucoup de magasines mis à notre disposition, et même un distributeur de café. Les infirmières sont familières et d’une gentillesse qui n’arrête pas de me toucher à chaque fois que je rentre dans les services. Elles me connaissent bien maintenant et me demandent comment se passent les choses depuis mon opération.

Je m’installe sur une chaise longue, très confortable, avec une télécommande pour régler les positions assises ou allongée. Ca me rappelle mes voyages en Business Class sur les grandes lignes… Une autre sorte de voyage aujourd’hui, mais en commun de longues heures d’attente passive.

Perfusion dans la main. Aïe ! J’ai de la chance aujourd’hui, elle ne s’y reprend pas à plusieurs fois.

Tiens, tiens, revoilà Mister Beaugosse, dont je ne connais pas même le nom. Un volontaire qui travaille dans le service, très beau garçon, la quarantaine bien tassée, qui nous propose boissons et fruits frais. Je n’y résiste pas, je lui demande une poire, qu’il pèle délicatement et me sert coupée en petits morceaux dans un petit pot avec une fourchette. On pourrait s’arrêter là et flirter un peu, mais non : je grimace car la piqûre m’entre dans la main au moment où il pose les fruits sur mon plateau. Zut alors ! Je lui dis « merci » dans toutes les langues que je connais pour l’épater. Mais, pas ému du tout, il sourit et continue sa tournée. Tant pis pour lui il ne sait pas ce qu’il rate. Reviens donc quand mes cheveux auront repoussés Beaugosse !

Ah, je rigole, mais en fait, j’adore les gens aux Pays-Bas, mon nouveau pays d’adoption. La gentillesse des gens lorsque les choses tournent mal est étonnante. Beaucoup de gens font du volontariat ici, et l’hôpital grouille de ces volontaires qui ont ces petits gestes qui réconfortent et que les soignants n’ont pas le temps de faire.

Alors avec mon verre et mon petit bol de fruits, et des infirmières qui bossent autour de nous comme des abeilles à la ruche, je suis prête. Six heures d’attente aujourd’hui.

Et là, j’ouvre mon Kindle et… pom pom pom pommm… Battery Empty. Oh la triple buse ! J’ai du le laisser allumé la dernière fois ! C’était il y a une semaine, lorsque j’ai lu Lance Armstrong. Ah l’idiote. Bon, quoi faire maintenant ? Méditation ? Pas le courage. Procrastination ? Mauvais pour santé mentale. Je ne peux pas écrire, la perfusion est sur ma main droite (car le bras gauche me fait mal à avoir reçu trop de ce poison plusieurs fois).

En désespoir de cause, je demande des magasines à l’infirmière… Magasines de voyage et de décoration. Ca ira. Surtout pas de magasine féminin avec leurs nanas aux longs cheveux brillants qui flottent au vent et leurs pubs de maquillage. Je ne supporte plus ! Les maisons et les paysages, ça passe. Et puis c’est bon pour mon Néerlandais.

Bientôt, je somnole car le premier produit qui passe dans mes veines est un anti- allergique qui fait somnoler. En général, je passe la moitié du temps à somnoler. J’ai bien déjà essayé de lutter pour rester éveillée, mais impossible. Cette fois-ci tant mieux, le temps passera plus vite.

Le prochain médicament du cocktail est du Bevacizumab. Ce nouveau médicament a montré des résultats prometteurs dans de récents essais cliniques. Il a amélioré les temps de rechute et pourrait peut-être même avoir un impact sur la survie – en tous cas, il réduit la progression des tumeurs dans le cas de cancer ovarien. C’est encore un médicament expérimental. Il a montré des effets positifs dans deux essais cliniques pour les cancers ovariens après avoir été utilisé avec succès dans d’autres cancers (pas tous, en particulier il ne semblait pas montrer d’effet positifs dans certains cancers du sein). Je vais recevoir ce nouveau médicament pour mes dernières deux chimiothérapies dans le contexte d’un essai clinique auquel j’ai accepté de participer. (Si cela vous intéresse d’en savoir plus, laissez moi un petit mot sur ce blog ou par email, et je vous parlerai des résultats des deux essais plus en détail).

Puis on m’administre taxol et carboplatine. Ces médicaments sont des classiques de la chimiothérapie du cancer ovarien lorsque le cancer vient d’être détecté (d’autres options sont proposées lorsque le cancer est récurrent). On ne ressent normalement aucun effet lors de leur administration, le seul risque immédiat serait l’allergie. On nous observe, température et pression sanguine sont prises régulièrement.

L’après-midi va passer lentement. J’étais la seconde arrivée et je suis la dernière partie. Les autres patients ont diverses stratégies pour vaincre l’ennui. La plupart lisent comme moi. Une femme dont le visage est familier est arrivée avec toutes ses cartes de Noël et son carnet d’adresse et prépare cartes et enveloppes. Bonne idée !

Une jeune femme portant un tchador est venue avec son mari, comme d’habitude. Nous avions sympathisé par un sourire et quelques phrases la dernière fois, car elle était assise à coté de moi et avait pleuré après que la première perfusion ait raté. Je connais bien le problème, ça m’arrive une fois sur deux! Vers 15 heures, elle s’apprête à partir et timidement distribue des chocolats « Célébration » à la ronde, aux infirmières et aux patients. Miam, merci ! Elle fête sa dernière chimio ! C’est touchant de voir quelqu’un partir. L’après cancer. Tous le monde est content pour elle et la congratule. Je lui dis : « Sterkte », dans mon Néerlandais approximatif ; une expression que j’ai entendue 100 fois ces derniers mois. La prochaine fois, ce sera moi qui distribuerai des chocolats, ma belle!

***

English Translation

Yesterday I went to my last but one chemo session.

The day before, I had a very bad night with all sorts of morbid nightmares. But in the morning, I'm ready and I know I have no reason be fearful: the day will go smoothly and without significant side effects. The hard part is mostly boredom really.

But for that, no problem, I’ve thought of everything. I took my Kindle, the electronic device where I can read books from Amazon. So I go to the hospital confident of carrying on me hundreds of thousands of books in my pocket.

I do not forget, much more critical, anti-nausea drugs I was prescribed and they will have to be taken regularly for four days.

My girlfriend Florence, my guardian angel, brought me to the hospital by car to 9 AM. The place is very familiar, and when I go to the desk to register, they don’t ask for any card. I throw my name and I head for the oncology service, like a regular subscriber.

The infusions take place in a large common room that seats six. This is a bright room with large windows, lots of magazines available, and even a free coffee dispenser. Nurses are familiar with a kindness that keeps touching me every time I go into this hospital in any of its department. They seem to know me well now, and ask me how things are going since my operation.

I sit on a couch, very comfortable, with a remote control to adjust the sitting or lying. It reminds me of my trips in Business Class on long distance flights... It’s another kind of travel today, but same long hours of waiting passively.

Perfusion in the hand. Ouch! I am lucky today, she does not have to try several times.

Well, well, Mister Handsome is also here today, and I don’t even know his name. A volunteer who works in the service, very handsome, in his late forties, he serves drinks and fresh fruits to whoever wants his services. I can not resist, I ask him a pear that he gently peels and cut into small pieces in a small pot with a fork, just for me. We could stop there and flirt a little, but no. I grimace because the needle gets into my hand just when as he serves the fruits on my plate. Damn! I tell him 'thank you' in every language I know to impress him. But not moved at all, he smiles and continues his tour. Too bad for him! He does not know what he’s just missed. Hey, just try to come back when my hair has grown back in a few months, Mister Handsome!

I’m laughing, but in fact, I love the people in the Netherlands, my new adopted country. The friendliness of these people when things go wrong is amazing. Many people are volunteering here, and the hospital is packed with these volunteers who have these little things that comfort us and that caregivers do not have time to do.

So with my drink and my small bowl of fruit, and nurses working around us like bees in their hive, I am ready. Six hours of waiting today.

And then I open my Kindle and ta-dah… “Your Battery is Empty” it says. Oh triple brainless! I must have kept it on the last time! It was a week ago, when I read Lance Armstrong. Ah, such an idiot. Well, what to do now? Meditation? No courage. Procrastination? Bad for mental health. I can not write, the infusion is on my right hand (because the left arm hurts too much after receiving the poison several times).

In desperation, I asked the nurse magazines... House, gardens and travel magazines, it will do. As long as it’s not a women magazine showing girls with long shiny hair floating in the wind, and make up ads. I can not stand these anymore. The houses and landscapes, it passes. And it's good for my Dutch.

Soon, I doze. The first product that goes through my veins is an anti-allergic that makes people sleepy. In general, I spend half the time to doze. I have tried to struggle to stay awake, but it’s impossible. This time its good news. Time will go faster.

The next drug in the cocktail is Bevacizumab. This new drug has shown promising results in recent clinical trials. It improved the time of relapse and may possibly have an impact on survival - at any rate, reduces tumor progression in the case of ovarian cancer. This is still an experimental drug. It has shown positive effects in two clinical trials for ovarian cancer after being successfully used in other cancers (not all, in particular it did not seem to show positive effects in some breast cancers). I receive this new drug for my last two chemotherapy regimens in the context of a clinical trial to which I agreed to participate. (If you are interested to know more, leave me a note on this blog or email and I'll tell you about the results of both tests in more detail).

Then the next plastic bags contain taxol and carboplatin. These drugs are classical chemotherapy of ovarian cancer for its first occurrence (other options are available when the cancer is recurring). I do not feel any side effect during the infusion; the only immediate risk would be an allergic reaction. They check our temperature and blood pressure very regularly.

The afternoon will go slowly. I was the second coming and I am the last gone. Other patients have various strategies to overcome boredom. Most read like me. A woman whose face looks familiar arrived with all her Christmas cards and address book, and prepared cards and envelopes. Good idea!

A young woman wearing a chador came with her husband, as usual. We hit it with a smile and a few sentences the last time because she was sitting next to me and wept after the first infusion has missed. I know the problem, it happens to me half the time! At 3 PM, she is about to leave and timidly distributes chocolates "Celebration" around, to nurses and patients. Yum, thank you! She celebrates her last chemo! It's touching to see someone leave. The after cancer will start for her. Everyone is happy for her and congratulates her. I say: "Sterkte", in my approximate Dutch, an expression I’ve heard 100 times in recent months. The next time, it will be me who will distribute chocolates, my dear!

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mardi 6 décembre 2011

Deux pas en avant, un pas en arrière: à l'aide! (Two Steps Forward, One Step Backward: Help!)

(English translation below)

La pluie battante m’a réveillée une fois de plus à 4h du matin. Il pleut depuis des jours, et le ciel nous offre rarement des éclaircies. L’hiver du Nord est sombre et humide. Déprimant.

J’ai des douleurs plein le ventre. C’est pénible, mais maintenant j'ai l'habitude. Je reste allongée dans mon lit en attendant que le temps passe. Puis je me lère péniblement et prends un thé pour m’hydrater. J’avale deux paracétamols, rien de trop fort pour éviter les effets à long terme des anti-douleurs plus puissants. Je me verse un second thé, puis un autre. Je me sens encore très vaguement nauséeuse mais cela commence à passer. Evelyne continue de veiller sur moi au quotidien.  

Cette dernière semaine a été une des plus longues et des plus difficiles. Depuis l’opération, je me remettais très doucement. Puis il a fallu reprendre le traitement de chimiothérapie lundi dernier, trois semaines après l’opération de réduction tumorale. A nouveau, j’ai eu de grandes difficultés à marcher car la chimio me délabre les intestins et me coupe l’appétit pendant plusieurs jours. Comme j’ai eu  du mal à manger et à bouger, je me suis affaiblie, j’ai perdu du poids, j’avais beaucoup de vertiges. Je pensais que le plus difficile commençait à être derrière moi mais cette semaine a été vraiment difficile et déprimante. Comme un grand pas en arrière.

Je me suis dit qu’il fallait remonter la pente et éviter la spirale vers le bas. Pas facile. La douleur physique et la fatigue morale avancent main dans la main. Le système immunitaire et le système nerveux central sont bien règlés et s’influencent l’un et l’autre. La douleur chronique et les infections activent des centres nerveux qui signalent à notre cerveau de ralentir nos activités pour préserver notre énergie, pour récupérer physiquement et cicatriser. Par exemple on se sent toujours légèrement déprimé et ralenti pendant une simple grippe. Alors après une opération et une série de chimios qui endommagent notre système immunitaire, être à plat moralement n’a rien d’exceptionnel.

Cette semaine je n’avais envie de rien. La plupart des aliments me dégoutaient. Les livres m’ennuyaient. M’assoir à l’ordinateur pour répondre aux emails demandait un effort surhumain. Même m’asseoir à mon piano ne m’amusait pas et me demandait trop d’effort.

Au moment où j’écris cela, mon moral remonte. Qu’est-ce qui a aidé ? D’une part la douleur a commencé à diminuer. Mais pour tenir le cap pendant ces jours difficiles, je crois que ce qui m’a le plus aidé a été de me plaindre !

J’ai dit et écrit à quelques proches que je ne me sentais pas bien, que j’étais impatiente, que rien de me faisait plus plaisir en ce moment, que j’avais mal depuis des mois maintenant, et que j'étais épuisée mentalement d’avoir mal jour et nuit depuis si longtemps... Certaines amies ont cherché des solutions (est-ce qu’un séjour dans le sud de la France au soleil pourrait m’aider ?). Toutes m’ont aidée à sortir du creux de la vague et à ne pas me noyer dans la dépression et l’anxiété. Elles m’ont rappelé que mon fils est un petit garçon brillant et stable, et que je dois arrêter de me faire du souci pour lui. Elles m’ont cité des tas d’exemples de gens qui se sont sortis du cancer et vivent maintenant très heureux. Elles m’ont raconté des guérisons extraordinaires. Elles m’ont  rappelé qu’il y a un soleil au-dessus des nuages les plus épais, et de la lumière au bout des tunnels. Elles m’ont m’encouragé à tenir bon « encore quelques temps ». Elles m’ont rappelé que mes douleurs vont s’atténuer et que c’est normal que tout cela prenne du temps.  

Mon esprit était aussi sombre que le ciel vu au travers de mes carreaux qui dégoulinaient. J’imaginais que j’allais mourir bientôt dans des souffrances atroces, et je n’arrivais plus à percevoir la beauté autour de moi ou à apprécier l’amour dont je suis entourée. Mais au bout du compte, se plaindre et parler de ses idées noires m’a aidé. A mesure que mes proches ont défilé à ma porte ou envoyé des emails, j’ai petit à petit repris courage et repris des forces. Je me suis sentie comprise.

Après quelques jours de blues, la véritable éclaircie est arrivée lorsque mon fils est entré dans la maison pour y passer la semaine. Il est arrivé avec ses histoires d’école, ses soucis de petit garçon. Il a voulu me montrer des videos sur Youtube qui m'ont fait bien rire. Il a reçu ses cadeaux de la Saint Nicolas. J’étais suffisamment en forme pour jouer à des jeux de société avec lui. Nous avons même fait quelques courses de ski de descente sur la Wii (de ma banquette, j'ai perdu evidemment!). Nous avons parlé des prochaines vacances au ski – déjà planifiées pour l’année prochaine. Nous nous sommes vraiment sentis très heureux et décontractés. Maintenant, il me demande avec insistance quel jour nous pourrons mettre les décorations de Noël. Je me mets à penser aux décorations, aux cadeaux, à l’endroit où nous passerons la nuit de la St Sylvestre pour regarder les feux d’artifice… Et me voici à nouveau très occupée, me sentant enfin utile, ayant moins de temps pour ne penser qu’à mon nombril, et toute remplie d’amour. Le bonheur revient !

Je l’avais déjà mentionné dans un article précédent, me référant à des études scientifiques sur le sujet : l’amour est vraiment un des meilleurs anti-douleurs. Se sentir compris, se sentir aimé, se sentir utile, se sentir apprécié, tout cela nous soigne et aide à éloigner la douleur, ne serait-ce qu’en détournant notre attention, mais aussi en jouant sur le système immunitaire. On se sent petit à petit plus léger, on sourit.

Alors que parfois l’envie est grande de s’isoler, il faut faire exactement le contraire, appeler, demander de la présence, s’entourer d’affection. Il faut accepter l’aide. Ce n’est pas toujours facile pour notre amour propre. Notre éducation nous demande de devenir indépendant et de ne pas trop demander des autres. Mais désormais j’accepte l’aide car je me dis que lorsque j’irai mieux ce sera à mon tour d’aider les autres. Ce n’est pas égoïste. On m’aide maintenant, j’ai aidé moi-même dans le passé et j’aiderai dans le futur. C’est simple finalement.  Je ne dis pas que c'est facile, c'est frustrant et un peu humiliant, mais le principal objectif pour le moment est de puiser des forces.

Je compte maintenant les semaines qui me restent avant la fin du traitement. Trois, deux, une chimio : début Février 2012, je devrais être sortie d’affaire et entendre que le cancer est parti pour de bon. Après ces jours sombres, je vois effectivement la lumière au bout du tunnel.  

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English Translation: Two steps forward, one step backward: Help!

The rain woke me up again at 4am. It has rained for days, and the sky rarely gives us any bright light. Winter in Northern Europe is dark and humid. Depressing.

My entire belly and my back are very painful when I wake up, but it has now become a habit. I usually lie down in my bed waiting for some time to pass. Then, still in much pain, I drink my first tea to get hydrated. I swallow two pills of paracetamol (nothing too hard to avoid long-term effects of powerful painkillers). I drink a second tea, and a third. I still feel vaguely nauseous, but it's started to go away. Evelyne has continued to watch over me every day.

This last week has been one of the longest and most difficult. Since the operation, I was recovering very slowly. Then we had to resume chemotherapy treatment last Monday, three weeks after the debulking surgery. I had great difficulty walking because my chemo hurts my intestines and makes me feel easily out of breath. I had trouble eating, and so I became weaker, lost weight again, felt dizzy... I thought the hardest part was starting to be behind me, but this week has been really difficult and depressing. It felt like a big step backwards.

I was telling myself that I should back up the hill and avoid the downward spiral. Not easy. Physical pain and mental fatigue go hand in hand. The immune system and central nervous system influence each other in many ways. Chronic pain and infections signal to our brain that we have to slow down our activities to preserve our energy to recover physically and heal. For example you always feel slightly depressed and idle during a simple flu. So after an operation and a series of chemos that damage our immune system, lying flat morally has nothing exceptional.

This week I wanted nothing. Most foods looked and smelled revolting. Books were boring. Sitting down at the computer to reply to emails demanded a superhuman effort. Even sitting down at my piano did not amuse me and asked me too much effort.

As I write this, my spirits went back up. What helped? On the one hand, the pain began to decrease. But to keep my head up during these difficult days, I think what helped me most was… to complain!

I told some friends and my family that I was not feeling well, that I was anxious, that nothing made me happy right now, that I had now been in pain for months, days and nights, and that I felt mentally exhausted... Some friends were looking for solutions (Could a stay in the south of France in the sunshine help me?). All of them helped me go out of the hollow of the wave and not to get drown by depression and pain.

They reminded me that my son is a bright and stable boy, and I have to stop worrying about him. They gave me a lot of examples of people who have gone through cancer and now live happy. They told me about some miracle cures to remind me to never loose hope. They told me that there is a bright and warm sun above the thickest clouds, and that there is always a light at the end of the tunnel. They encouraged me to hold on "for some time." They reminded me that my pain will drop and it is normal that all this takes time.

My mind was as dark as the sky seen through my dripping windows. I imagined that I would soon die in agony, and I could not see the beauty around me and appreciate the love I was surrounded with. But in the end, complaining and talking about some of my darkest thoughts helped me. My family and close friends came to visit or sent emails to cheer me up. I gradually found more courage and regained strength. I felt understood.

After a few days brooding, true brightness came when my son entered the house to start his week with us. He arrived with his school stories and his little boy concerns. He showed me Youtube videos that made me laugh. We celebrated Saint Nicolas. I was fit enough to play board games with him and we even played a skiing race on the Wii game (from my sofa… I lost of course!). We talked about out next skiing holidays, already all booked for next year. We had a good time. And now, he is looking forward to set up the Christmas decorations, keeping me busy with thinking about the Christmas gifts, decorations, and where we should be to watch the fire works of the new year’s celebrations... And here I am, busy, finally feeling good, having less time to think only of my navel, making small plans, and full of love. Happiness is back!

I had mentioned in a previous article, with reference to scientific studies on the subject: love is truly one of the best painkillers. To feel understood, to feel loved, to feel useful, to feel appreciated, heal and help take out some physical and mental pain, not least by diverting our attention, but also by playing on our immune system. You feel lighter gradually, you smile...

While sometimes the urge is great to be alone and isolate myself, I must do the exact opposite: call, ask for a presence, and surround myself with affection. You have to accept help. It's not always easy for the self-esteem. Our education requires us to become independent and to strictly limit how much we ask from others. But now I accept help, because I tell myself that when I will feel better, it is my turn to help others. It is not selfish. One helps me now; I’ve helped others in the past; and I will help others in the future. It's simple after all. I am not saying this is easy. This is actually frustrating and a little bit humiliating still, but the main objective now is to get more strengths.

I can now count down the weeks left before the end of treatment. Three, two, one chemo: early February 2012, I should be done with the treatment and hopefully hear the good news that cancer is all gone. After these last dark days, I do see light at the end of the tunnel.

***